samedi 19 novembre 2016

THE END

MAURICE - REUNION
DERNIERE NAVE DE CE CIRCCUM NAVIGATION


Nous quittons Maurice en milieu de journée avec un petit 15
noeuds un jour avant le départ des bateaux de l'ARC. Nous avançons
sous Grand-Voile et Génois. Au fur et à mesure que nous nous éloignons
de Maurice, le vent faiblit. Un peu avant minuit, nous décidons
d'enrouler le Génois et d'allumer le moteur afin de garder une
certaine vitesse. Compte-tenu de ce problème de fièvre aphteuse, nous
devons arriver au Port entre 8h et 17h. Passé ce délai, des corps
morts ont été installés et nous devons nous amarrer dessus en
attendant le lendemain matin.
Nous tenons cependant à arriver le 27 afin de ne pas rater l'équipage
d'Ylang-Ylang en vacances à la Réunion jusqu'au 29, date de leur
départ pour la nouvelle-Calédonie où ils ont laissé leur catamaran.



Vraiment, cette fois, c'est la dernière
Assurément, le terme en est si prés
Suite et fin de cette trilogie
Creusant au vent notre sillage
Où nos pieds ont foulé tant de pays
Nourrissant nos âmes de lumières
Aveuglés, presque, par tant de beautés
Tant et tellement de paysages.
Caressant, Levants et couchants
Horizon, Ile de La Réunion
Escale et retour à terre
Ziskakan, sa nou konné pas, non
Il nous faut laisser le temps au temps
Pour dépasser d'autres frontières.


Nous aurions aimé faire notre dernière nave sous voile sans
le bruit du moteur, contempler les étoiles avec comme unique son, le
bruissement de l'eau le long de la coque mais Eole en a décidé
autrement sans en être véritablement responsable. Si nous avions eu
plus de temps, si nous avions, peut-être, un peu moins traîné dans
certaines escales, nous aurions pu nous laisser porter lentement par
le vent mais nous nous sommes imposés un timming et nous nous sommes
nous même sanctionnés.

Au petit jour, nous devinons les côtes de notre chère île
laquelle joue à cache-cache avec les brumes matinales. Nous découvrons
l'amorce des travaux de la nouvelle route du littoral et retrouvons le
vent après le cap Bernard. Nous renvoyons le Génois et longeons la
baie de la Possession.
Début d'aprés midi, appel VHF sur le 16 pour prévenir de notre arrivée
et avoir l'autorisation d'entrer dans le Port, puis appel sur le canal
9 afin que la Capitainerie des Maîtres de Port nous indique où nous
amarrer.

"Nous lé pas plis, nou lé pa moin", comme dirait une
personne qui se reconnaîtra, la Matelote, en prévision de l'arrivée
des bateaux de l'ARC à la Réunion, a paré Layang d'un grand pavois
personnalisé avec tous les pavillons des pays où nous avons fait
escale. A ce titre, en réaction au constat fait dans nos escales,
notamment dans des territoires français comme Mayotte ou la Guyane
Française sans parler des Marquises, de la Polynésie Française, des
Tuamutus ou encore de la Nouvelle-Calédonie où le Pavillon de ces
territoires flotte au côté du drapeau français, la Matelote, pour ne
pas être en reste, à décider de confectionner, à la mano, des
pavillons réunionnais après l'escale en Guyane (l'air de rien, cela
prend du temps de les réaliser à la main), et, du coup, a fait parler
sa plume et cela donne ce qui suit :


Paviyon La Réunion, li lé tro zoli
Kan li flot', enlèr dann ven
Paviyon La Réunion, li lé tro zoli
Kan li flot', enlèr dann ven

Dann blé, na retrouvé
Siel blé, l'océan
Epi lo rouge, li pou rappèl
La Fournaise i pèt toultan
Epi na lo zone, li pou konté
Do moun i viv' dann soleil

Paviyon La Réunion, li lé tro zoli
Kan li flot', enlèr dann ven
Paviyon La Réunion, li lé tro zoli
Kan li flot', enlèr dann ven

A koz a nou, nou lé bishik
Nena un ta, zot i serv bien
La Guadeloupe, La Martinique,
La Guyane, Mayotte osi
Nou lé pas plis, nou lé pa moin
Ti Pavillon, i faut li flot' osi

Paviyon La Réunion, Paviyon inn ti Région
Pou fé konnèt not ti péi
Paviyon La Réunion, Paviyon inn ti Nation
Pou pa do moun i oubli :

"NOU LE LA, E OUSA NOU LE"


N.B. : La Matelote tient à remercier personnellement, une personne, à
savoir : Jessica IMAHO-ICHIZA pour son aide, sa supervision et les
corrections apportées au texte de ce poême écrit en kréol. Peut-être
subsiste-t-il quelques erreurs qui ne sont pas de son fait, juste
question de timming.

Ainsi, nous avons, au cours de nos escales et sur des
temps forts comme le passage du canal de Panama, hissées les couleurs
de La Réunion et les avons déposées au quatre coins du monde dès que
cela nous était possible et que nous avions matière à le faire.

En approche du chenal d'entrée, nous enroulons le Génois,
affalons la Grand-Voile et amorçons l'entrée. Soudain, le moteur câle,
histoire de nous faire monter un peu plus l'adrénaline. Est-ce
possible que Layang essaie de communiquer avec nous et nous fasse part
de sa désapprobation à cesser de naviguer ?. Serait-il devenu mutin ?.
Nous parvenons à réamorcer le moteur et avançons doucement, doucement,
dans l'espoir qu'il ne câle pas de nouveau car s'il nous faut rentrer
à la voile, ça ne va pas être de la tarte... Nous apercevons les
copains qui nous attendent et nous saluent.
Après plusieurs tours dans le bassin d'évitage, temps pour nous de
situer où se trouve la Marina Titan que nous ne connaissons pas, nous
finissons par repérer l'entrée et nous engouffrons dans la passe.
Pierre, le Maître de Port nous indique vers quelle place nous diriger,
les potes sont présents sur les cat-way pour attraper les amarres,
nous nous galérons un peu pour diriger Layang qui, par petites ruades,
dévie de la trajectoire que nous voudrions qu'il prenne. Face aux
difficultés rencontrées dans les manoeuvres, les moukatages vont bon
train... "Té, zot i vienn fé lo tour du monde é zot i gagn pa rent
dann port". "Trakas pa! Tilamp, tilamp, na arivé!. Enfin... nou espèr
!. Une amarre avant ayant été saisie, Layang se réchigne toujours à
prendre sa place et se débat encore. Finalement, tenu par l'avant,
tenu par l'arrière, il semble se résigner et, malgré lui, se
positionne le long du cat-way.

Et voilà, c'est fini
Trois années et demi
Qu'on a pas vu passé
A silloner les mers
Plutôt, par vent arrière
C'est fini...

Et voilà, c'est fini
La veille, les quarts de nuit
Sont pour être oubliés
Avançant sur les flots
Parfois, par temps très gros
C'est fini...

Et voilà, c'est fini
Au coeur, la nostalgie
De ces nombreux pays
De tous ces paysages
De ces nombreux rivages
C'est fini...

Et voilà, c'est fini
S'éloignent les amis
Croisés sur la route
A terre ou sur mer
Temps trop éphémères
C'est fini...

Et voilà, c'est fini
Les douze coups de minuit
Là, plus aucun doute
Sonne l'heure du retour
Sans plus aucun détour
C'est fini...

Et voilà, c'est fini
Nous rentrons au pays
Ainsi, va la vie
Amis, coquin de sort
Layang rejoint son port
C'est fini...

Et voilà, c'est fini
Mais, nomades, sont nos amis
Et, au fond de leur tête
Vers un nouveau projet
Le coeur toujours en fête
Sont déjà... repartis!!!



Nous voilà donc amarrés dans la nouvelle Marina. Les
copains se succèdent pour nous signifier leur plaisir à nous
retrouver. Ylang-Ylang sera au rendez-vous et nous pourront partager
quelques heures avec eux avant leur départ pour la Nouvelle-Calédonie.
Nous leur laissons les contacts de Diego et autres amis basés là-bas
susceptibles de leur apporter conseils et aides diverses et variés.

Nous reprenons plus ou moins doucement pied avec la
vie terrestre et ses contraintes, notamment, au niveau paperasses.
Certes, nous en avions en bateau mais le retour à terre implique que
cette réalité lui donne une puissance X. Pas forcément évident et
facile de fournir les documents demandés lorsque l'on a quitté terre
depuis plus de trois ans. Sans l'avoir été réellement, d'une certaine
façon, nous sommes , à l'insu de notre plein gré, quelque peu sortis
du système. Une foultitude de questions nous submerge, et ce, dans
différents domaines. Nous nous adaptons en fonction des informations
qui nous arrivent et tentons de trouver des solutions. Par chance,
nous récupérons des véhicules que des amis nous prêtent gracieusement,
histoire que l'on démaille tous les méandres administratifs auxquels
nous sommes involontairement confrontrés.

Cette étape nous rappelle ceux qui, comme nous, ont
bouclé la boucle, "Myriam" rentrés au Canada, "Les Pirates" rentrés en
Nouvelle-Calédonie, "Les Rebelles" rentrés en Guyane Française,
"Tyarmen" et "Maméju" rentrés en Métropole, "Ronbus" rentré en
Nouvelle-Zélande, "Sangona" rentrés en Afrique du Sud. D'autres sont
en escales prolongées comme Ylang-Ylang en Nouvelle-Calédonie, "Oboé
d'Amore" en Polynésie Française, "Coccinelle" ou "Goyave" aux
Marquises. Ceux qui ont laissé le bateau à divers endroits du monde
pour reconstituer la caisse de bord commme "Gérémia" rentré en
Belgique pour reprendre son taf, "Clown" rentré en Métropole pour
s'occuper de leur théâtre. Et d'autres qui continuent la route comme
"Les Coyotes", "Catanello", "C'est la vie", "Ui", "Thinking of Dave",
"Gabian" certainement. A ces gymnastes de la vie (plus
particulièrement pour les 3 premiers) qui ont su faire des choix,
s'adapter et rebondir pour continuer l'aventure sur la mer, nous vous
disons bon vent et profitez bien de la chance qui vous est donné, nous
vous souhaitons tout le meilleur du monde, aux autres aussi
d'ailleurs. A ceux en stand-by parce que.... multiples raisons.... la
route va reprendre tôt au tard pour d'autres horizons, patience et
bonheur au bout de la route. A ceux qui, comme nous, sont rentrés pour
une période d'immobilisme et donc retournés à une vie terrienne,
patience et courage, demain est un jour nouveau. Certains ne le vivent
pas si mal comme notre dalon Henri sur "Equilibre" ou encore "Bonté"
basés en Nouvelle-Calédonie mais restant vivre à bord de leur bateau.
La rupture avec notre mode de vie n'est pas que pour nous, le Mousse,
de son côté, va la vivre également avec un retour à l'école, des
contraintes horaires, et j'en passe....



MESSAGE DE LA MATELOTE ET DU CAPITAINE
AU MOUSSE


Trois ans passés sur les Océans
Les Océans
Au départ, just'âgé de six ans
Oui, de six ans
Au retour, tu as neuf ans et d'mi
Et le voyage est vraiment fini.

Mon petit gars, tu connaîtras
Des passes et des passages
Bons ou mauvais, nous ne savons pas,
Mais c'est le terme du voyage.

Te voilà rentrer à La Réunion
La Réunion
Tu vas revivre dans une maison
Une maison
Mais rassures-toi la vie à terre
A également ses mystères.

Mon petit gars, tu apprendras
Les moukatages, les comérages
Et s'ils te touchent, y faudra pas
Leur dire qu'il y a ravage.

Tu connaîtras d'autres déroutes
D'autres déroutes,
Qui immisseront chez toi le doute
Oui, le doute
Il te faudra encor' être fort,
Et ne pas relâcher tes efforts.

Mon petit gars, ne t'inquiètes pas
Parmi les hommes, il est des sages,
Avec eux, tu te rallieras
Pour une vie sans ombrage.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire